LE PORTAIT DE MARCOS MORAU
Crédits photo : La Veronal – Sonoma
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Marcos Morau, chorégraphe espagnol né en 1982, s’impose comme l’une des figures les plus marquantes de la danse contemporaine.
Formé à la photographie, à la chorégraphie et au théâtre entre Valence, Barcelone et New York, il développe avec La Veronal, collectif fondé en 2005, une approche interdisciplinaire et totale du mouvement.
Son vocabulaire singulier — la méthode KOVA — l’a conduit sur les plus grandes scènes internationales avec des pièces telles que Sonoma ou Afanador.

Une trajectoire artistique unique
D’abord assistant au Nederland Dans Theater II et à IT Dansa, il fonde La Veronal en 2005, à Barcelone.
Véritable laboratoire, La Veronal est un collectif d’artistes en quête de nouveauté dans l’art. Marcos Morau y cumule les rôles de directeur artistique, chorégraphe, scénographe, créateur lumière et costumes, assurant une cohérence esthétique globale.
Sous sa direction, La Veronal s’est produite dans un grand nombre de pays, sur les scènes les plus renommées, du Théâtre National de Chaillot à Paris au Sadler’s Wells de Londres.
Marcos Morau collabore également avec de prestigieuses compagnies internationales, dont le Nederlands Dans Theater, le Ballet de l’Opéra de Lyon, Les Grands Ballets Canadiens ou encore le Staatsballet Berlin, dont il est artiste associé depuis 2023.
Durant la dernière décennie, Marcos Morau poursuit une belle ascension sur la scène européenne. Il a été récompensé par le Prix National de la Danse en Espagne (2013), fait Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres en France (2023), élu Meilleur chorégraphe de l’année par la revue Tanz la même année. Il a également reçu le prix FAD Sebastià Gascon, décerné par la Fondation for Arts & Design, et le prix Time Out du meilleur créateur.
Marcos Morau est par ailleurs enseignant. Il anime des ateliers autour des processus de création et de la dramaturgie dans des conservatoires et des universités (Institut Del Teatre, Université des Arts de Strasbourg, Sorbonne Nouvelle à Paris).
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Une esthétique plastique et surréaliste
L’univers de Marcos Morau se caractérise par une fusion audacieuse des disciplines artistiques. Des images puissantes, des corps sculptés par la lumière, un sens du rythme proche du montage cinématographique. Son approche est résolument plastique.
N’étant pas danseur, l’attention de Marcos Morau se porte avant tout sur la création dans sa globalité. Il intègre la danse comme un véritable moyen d’expression, en jouant sur les textures et les énergies du corps, sans jamais la dissocier des dimensions visuelles, musicales ou théâtrales : tout se relie, tout se répond.
Le langage de Marcos Morau est héritier du mouvement abstrait et du théâtre physique. Ses influences vont du surréalisme de Luis Buñuel à la danse de Pina Bausch et de Maurice Béjart, en passant par la photographie et le cinéma contemporain. Ses créations explorent la mémoire, l’identité, la vie et la mort — à travers des œuvres collectives.
Chaque spectacle est conçu comme une fresque vivante – souvent onirique.

La méthode KOVA : une danse précise
Au cœur de sa recherche, une invention : la méthode KOVA. Cette méthode vise à transformer le corps du danseur en instrument précis et conscient, où chaque geste est préparé et mentalisé avant d’être exécuté. Ici, pas de spontanéité brute : la précision prime. KOVA exige une intensité intellectuelle, un contrôle total et une attention extrême à la forme et aux qualités du mouvement.
Concrètement, les danseurs, souvent en situation d’improvisation, projettent mentalement leurs mouvements avant de se mettre en œuvre. Ils imaginent des formes, des objets ou des balles autour d’eux. Ces éléments deviennent alors partenaires de jeu : il s’agit de les contourner, de les déplacer, de tracer leur trajectoire, de les ressentir à l’intérieur du corps ou encore de les éviter — un concept que les danseurs nomment Avoid. Ainsi, le mouvement se fragmente, s’isole, se précise. Chaque partie du corps – les mobiles comme les immobiles – est conscientisée.
Dans des pièces comme Cathedral, créée pour le Scapino Ballet Rotterdam, la méthode KOVA permet de créer des figures robotiques, des mouvements géométriques et répétitifs, qui traduisent une vision futuriste et déshumanisée de l’existence.
Œuvres majeures
Sonoma (2020)
Inspirée du surréalisme de Buñuel, Sonoma fusionne la danse, la photographie et le cinéma pour explorer la mémoire et l’identité. Le souhait de Marcos Morau est de revenir à l’histoire du cinéma espagnol et de revisiter la tradition. Sonoma parle de cette forme d’intemporalité à partir d’images traditionnelles – du folklore espagnol.
La scénographie minimaliste utilise fleurs, cordes et objets du quotidien, complétée par des costumes empruntés aux traditions populaires espagnoles. Le rythme est un élément majeur — celui des voix, des danses, des séquences.
Présentée notamment en 2021 au Festival d’Avignon et en 2022 au Théâtre National de Chaillot à Paris, Sonoma a été saluée pour sa beauté visuelle et sa profondeur émotionnelle.

Los Pájaros Muertos (2009)
Los Pàjaros Muertos (Les oiseaux morts) s’appuie sur la vie et l’œuvre de Pablo Picasso, et plus précisément sur son tableau éponyme.
L’œuvre utilise ce point de départ pictural pour explorer des thèmes comme la guerre, le voyage, l’amour, le sexe, mais aussi la mort. La pièce rend hommage à une époque — le XXᵉ siècle — traversée par Picasso, par les avant-gardes, par la tradition espagnole et par Paris comme point de chute.
Les arts s’y entremêlent dans une dimension à la fois sensorielle et symbolique. Les corps, tantôt rassemblés tantôt fragmentés, traversent une chorégraphie où la danse contemporaine dialogue avec des formes plus traditionnelles, telles que le paso doble et le boléro, pour évoquer l’Espagne et sa mémoire collective.

Afanador (2023)
Créée pour le Ballet Nacional de España, cette pièce résulte d’une collaboration avec l’artiste Ruven Afanador, photographe colombien. Ses recueils de photographies Mil Besos et Angel Gitano ont été le point de départ créatif de Marcos Morau.
40 danseurs sur le plateau réinventent le flamenco, ici dégenré, stylisé, traversé par une esthétique queer. Les costumes monochromes et la lumière saisissante façonnent une atmosphère surréaliste.
Afanador a remporté plusieurs Premios Max 2025, dont celui du Meilleur Spectacle de Danse et de la Meilleure Direction de Scène pour Marcos Morau.



Prochaines représentations
- Afanador. Ballet Nacional de España. Festival de Danse de Cannes.Palais des Festivals et des Congrès de Cannes (Grand Auditorium) les 22 & 23 novembre 2025.
- Afanador. Ballet Nacional de España. Aix en Provence 4 au 6 décembre 2025.
- Opéra Garnier, Paris : Empreintes ( incluant la création “Étude” de Marcos Morau) du 11 au 28 mars 2026.
- Afanador. Ballet Nacional de España. Théâtre du Châtelet, Paris. Du 27 mars au 2 avril.
- Grand Théâtre de Genève : Svatbata, du 19 au 23 mai 2026.
Théa Breso
Théa danse depuis le plus jeune âge. Désormais danseuse pluri-disciplinaire, elle rêve d’une vie de danse et de voyage.
Depuis peu, elle enrichit sa pratique en posant des mots sur son art.
Les studios et les salles de spectacle sont un peu comme la continuité de son appartement.
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