L’interview de Marion Barbeau
première danseuse
du Ballet de l’Opéra de Paris

Crédits photo : Marion Barbeau par Lucie Hamon

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Marion Barbeau a été nommée première danseuse de l‘Opéra de Paris en 2019.
Formée par l’Ecole de l’Opéra de Paris dès l’âge de 11 ans, elle nous raconte ce que peut la danse à l’Opéra.
Marion tient le premier rôle dans En Corps, le dernier film de Cédric Klapisch.

Marion, qui es-tu ?

« Je m’appelle Marion Barbeau, je viens d’avoir 29 ans. Je suis Première Danseuse à l’Opéra de Paris. Récemment, j’ai fondé ma compagnie qui s’appelle Alt.Take (avec Simon Leborgne, danseur de l’Opéra de Paris ndlr) »

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Pourquoi as-tu choisi la danse ?

« Je me pose encore la question. Cela paraît tellement évident et essentiel que je n’ai pas vraiment la réponse. À l’origine, c’était assez basique. Le cours du mercredi s’est transformé en cours du lundi, mardi, jeudi, vendredi, samedi et dimanche.
Au début, la danse était une activité comme une autre. J’avais envie de faire plein de choses différentes. J’aimais beaucoup le dessin, l’escrime, le théâtre. J’ai eu la chance de tomber dans un cours de danse génial avec un professeur passionné qui m’a tout de suite entraînée dans son amour pour la danse. Elle connaissait bien l’Opéra et elle a très vite vu qu’il y avait du potentiel en moi. Elle a été très stricte et très sévère dès le début mais il y avait quelque chose de stimulant dans le même temps.

La danse peut m’apporter des émotions différentes. Ce n’est pas forcément toujours du positif. Cela peut aussi être beaucoup de stress, de frustration. Toutes les émotions que l’on peut avoir dans une vie se mélangent.
On peut comparer cela au fait de tomber amoureux, ce qui provoque dans le corps de l’adrénaline. Tout cela, on le ressent quand on danse et pas forcément lorsque l’on est sur scène. Il peut se passer beaucoup de choses dans le studio : les émotions peuvent être aussi fortes que sur scène. »

Marion Barbeau Opéra de Paris
Crédit photo : Elbe Weging. Marion Barbeau dans Dogs Sleep de Marco Goecke

Dans la danse, qu’est-ce qui te fascine le plus : le mouvement, la musique, les émotions d’un corps qui danse ?

« Pour moi, la musique est très importante. Cette espèce d’osmose et ce rapport intime avec la musique où l’on essaye d’aller chercher un maximum de nuances dans sa danse pour rendre hommage à la musique que l’on écoute est assez fascinant. L’énergie du corps est infinie. Lorsque l’on connaît son corps et que l’on danse, le corps parle très librement. Quand on grandit, on apprend les gestes conventionnels et parfois quand on danse, c’est comme s’il n’y avait plus de filtre entre notre âme et le corps. On laisse parler notre âme à travers le corps, sans barrière. »

« On laisse parler notre âme à travers le corps, sans barrière et sans filtre »

Tu sembles de plus en plus attirée par les pièces contemporaines. Pourquoi cet appel ?

« Souvent on dit que l’on se sent plus libre en contemporain mais je n’ai pas envie d’aller par là. Dans les quelques rôles classiques que j’ai pu aborder récemment, c’est une recherche constante de la liberté. C’est vrai qu’il y a quelque chose dans le contemporain où tout est possible. Il n’y a pas de code, pas de position juste ou pas juste. Il y a une qualité de danse, une qualité de corps à trouver qui peut être très rigoureuse. Il y a aussi quelque chose qui m’intéresse beaucoup, c’est la féminité dans la danse contemporaine que je trouve bien plus complexe et intéressante. On peut jouer avec les codes de la beauté et on peut explorer plus de facettes de notre personnalité. Cela permet d’exprimer différents types de beauté, de rechercher une féminité qui n’est pas forcément celle que l’on connaît de la danseuse classique. La question du genre et de la beauté en contemporain est très intéressante. »

Marion Barbeau Casse-Noisettes Opera de Paris
Crédit photo : Agathe Poupeney. Marion Barbeau dans Casse-Noisette

Est-ce que tu as un souvenir d’une émotion très forte en tant que danseuse sur scène ?

« Oui, c’était pour le ballet opéra Lolanta / Casse-Noisette. J’avais déjà fait la création en 2016 et je l’ai reprise l’année dernière (ndlr : en 2019). C’est un ballet un peu particulier puisqu’il s’est créé avec trois chorégraphes qui ont un langage très différent : Arthur Pita, Édouard Lock et Sidi Larbi Cherkaoui. Tout cela a été géré et mis en scène par Dmitri Tcherniakov, qui est un garçon absolument incroyable. C’est un metteur en scène d’opéra, pas du tout de ballet. À la fin de la pièce, il m’a demandé de pleurer et de crier très fort parce qu’il fallait couvrir l’orchestre et le rideau de tulle qu’il y avait entre la scène et la salle. Ce n’était pas ce qu’il y avait de plus naturel mais c’était tellement libérateur. L’année dernière, quand j’ai repris ce ballet, les émotions étaient encore plus fortes. Je me souviens d’un soir, c’était le dernier soir d’une amie collègue qui a démissionné de l’Opéra pour faire complètement autre chose. Ce soir-là, c’était spécial, les cris et les larmes resteront mémorables. »

« Il suffit d’accélérer ou de ralentir un geste du quotidien pour que cela devienne de la danse « 

Qu’est-ce que cela évoque pour toi « Tous Danseurs » ?

« Nous sommes tous danseurs, même les gens que l’on pourrait appeler les non-danseurs. Il suffit d’accélérer ou de ralentir un geste du quotidien pour que cela devienne de la danse. C’est intéressant de voir qu’il y a de la danse partout. Nous sommes tous danseurs. Marcher, sourire, c’est danser. Tout peut être danse. Tout le monde danse et pas que les humains. Lorsque l’on regarde les animaux, on peut aussi imaginer que c’est de la danse. C’est génial de se dire que tout est danse. »

Extraits du podcast EP. 21. Propos recueillis par Dorothée de Cabissole

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Dorothée de CabisSole
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